Plan de retrait de l’industrie porcine : près de 200 soumissions acceptées

Le programme de retrait volontaire des Éleveurs de porcs du Québec semble vouloir atteindre ses objectifs, soit de réduire la production annuelle de la filière, à la suite de la fermeture de certains abattoirs, principalement celui de Vallée-Jonction en décembre dernier.

Au total, 197 soumissions ont été acceptées à la suite des deux concours, soit toutes celles reçues qui respectaient les critères, ce qui représente une réduction de production d’environ 328 000 porcs par année.

Les chiffres ont été présentés aux membres de la fédération en juin dernier, lors de la plus récente assemblée générale annuelle. « On s’en va vers la direction que l’on avait ciblée, soit une réduction d’environ 9 % de la production », indique le président des Éleveurs de porcs du ­Québec, ­Louis-Philippe ­Roy.

Près de 300 entreprises ont appliqué sur le programme de retrait, sauf que certaines ont vu leur soumission rejetée en raison des critères d’admissibilité au programme. La démarche a été longue, convient M. Roy, ­lui-même producteur à ­Saint-Michel-­de-Bellechasse. L’équilibre entre la production et la capacité d’abattage était le principal facteur de cette démarche, ­rappelle-t-il.

« C’était la première fois que les Éleveurs mettaient en place un tel programme. Il y avait eu une démarche similaire en 2008‑2009, mais elle était gérée par le ­fédéral et les Éleveurs étaient moins impliqués à ce moment. C’est différent aussi, car nous avons eu la fermeture de l’abattoir de ­Vallée-Jonction, ce qui a provoqué un peu les choses », ­avoue-t-il.

Parmi les critères à considérer dans le programme de retrait, les producteurs devaient être prudents dans l’évaluation de leur entreprise. « ­Si un producteur présentait une soumission illustrant une construction neuve, la demande était rejetée, tout comme ceux qui avaient déjà fermé des bâtiments et liquidé des inventaires. C’était un programme qui visait à compenser ceux qui faisaient le choix de quitter dignement la production porcine. »

Le calendrier de dépeuplement suit son cours. Certains pourront espérer fermer leur production au plus tard en mars 2025. Au final, le mécanisme aura coûté autour de 18 millions $, indique la fédération, qui ajoute que les éleveurs et éleveuses payent ce montant par l’entremise de contributions spéciales, et ce, à chaque porc payé.

REMODELER LA FILIÈRE

L’abattoir de ­Vallée-Jonction­ pouvait représenter de 12 à 15 % de la production québécoise, évalue M. Roy. Il rappelle que les Éleveurs ont pu se rasseoir avec les acheteurs avant la fermeture pour déjà réduire la production et réassigner des porcs ailleurs au ­Québec.

« ­Une partie de la région livre maintenant chez ­Asta à ­Saint-Alexandre dans le ­Bas-St-Laurent, d’autres sont assignés à Yamachiche et même jusqu’à ­Saint-Esprit, alors pour combler les coûts énormes de transport, on vient compenser les producteurs pour les kilomètres supplémentaires. Il faudra toutefois remettre ça à jour bientôt pour avoir un prix similaire pour tous. »

Comme anticipé, le prix du porc demeure variable, ce qui fait que certains producteurs réussissent à faire leurs frais, sauf que d’autres non, indique M. Roy. «  Si nous n’avions pas connu une embellie du prix en avril, on aurait pu penser passer un bel été. Ce qui vient nous aider, c’est le prix du grain qui a diminué. »

LES ÉLEVEURS ET LES AUTRES

Visiblement sensible face aux critiques dirigées contre le plan conjoint de son organisation, ­Louis-Philippe ­Roy invite les indépendants et autres organisations à s’asseoir à la même table que les Éleveurs.

« L’industrie dans son ensemble doit se parler. Dans le volume de porcs que l’on produit au ­Québec, ce n’est pas dans la division et en disant que les Éleveurs ne représentent pas bien les producteurs que l’on va avancer. Nous sommes dans une mise en marché collective, tout comme dans d’autres productions. La ­Régie des marchés agricoles n’est ­peut-être pas la meilleure voie pour trouver des solutions. Il faut donc travailler ensemble. Nos outils de mise en marché ­sont-ils adéquats? ­Est-ce que l’on peut les moderniser? ­On se questionne, mais on doit le faire ensemble. Si on m’attaque sur le plan conjoint, je vais sortir toute l’artillerie pour le défendre. Si au lieu d’envoyer des porcs en ­Ontario, on avait pu les ramener au ­Québec, on l’aurait fait. »

­Louis-Philippe ­Roy demeure confiant que l’industrie porcine sera un jour rentable. Les Éleveurs se lancent d’ailleurs sur une vaste réflexion relativement au filet de sécurité qui entoure l’industrie, démarche qui pourrait durer environ deux ans. Il insiste que la réflexion dictera la prochaine négociation du prix avec les acheteurs.

« Il faut démontrer que nous faisons tout pour en vivre de cette production. Les producteurs sont tannés d’utiliser l’assurance stabilisation pour gérer la transformation de l’industrie. Le nouveau modèle parle d’une coupure de 17,50 $. Les producteurs sont performants, mais c’est un gros montant à aller chercher à la ferme. La crise que l’on a vécu en était une de transformateurs et non de producteurs. Il faut voir ce que l’on veut comme industrie pour les 15 ou 20 prochaines années », ­conclut-il.