Le directeur général de Beaulac-Garthby se sent pris entre le marteau et l’enclume

La Direction des enquêtes et des poursuites en intégrité municipale (DEPIM) de la Commission municipale du Québec (CMQ) reproche au directeur général de Beaulac-Garthby, Claude Lebel, d’avoir contrevenu à son obligation de réserve et de loyauté pour avoir fait, lors de la séance publique du 2 avril dernier, la lecture d’une lettre déplorant le comportement des conseillères Christina Pinard et Manon Jolin à son endroit. Celle-ci a par la suite été publiée sur la page Facebook de la Municipalité où les citoyens ont débattu dans la section des commentaires. Pour sa part, le directeur général déplore le climat toxique au sein du conseil.

Dans son rapport, la DEPIM estime qu’il a commis un acte répréhensible en formulant ces allégations en pleine séance du conseil et que les propos rapportés dans la lettre sont exagérés. Il est indiqué que le directeur général devait utiliser l’un des forums appropriés pour faire part de ses récriminations.

L’enquête aurait démontré qu’il n’y a eu aucune discussion ni rencontre entre le directeur général et les membres du conseil à ce sujet, faisant état d’un inconfort en lien avec les situations divulguées, et qu’aucune plainte n’a été formulée auprès d’une instance appropriée comme la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail ou encore la Commission municipale du Québec.

La DEPIM recommande au directeur général de présenter ses excuses aux conseillères, de faire valoir ses récriminations aux instances appropriées, puis de suivre une formation sur l’éthique et la déontologie applicables aux employés municipaux. Elle propose aussi à la Municipalité d’adopter un règlement visant la prévention du harcèlement psychologique et le traitement des plaintes.

UN CLIMAT ENCORE TOXIQUE

Ce n’est pas la première fois que la Municipalité de Beaulac-Garthby fait les manchettes en raison du climat toxique qui perdure au sein du conseil municipal. Lors des séances publiques diffusées sur Internet, les citoyens sont en mesure de constater la division qui y règne. Des échanges houleux entre les conseillères Pinard et Jolin, et les autres élu(e)s, ont été observés à plusieurs reprises. 

« C’est une situation extrêmement délicate. D’ailleurs, la DEPIM ne se gêne pas pour le dire dans son rapport. Mon rôle, tel que je le comprends et que j’assume, est de travailler pour la population à travers la volonté du conseil. Dans le cas de Beaulac-Garthby, on parle de la majorité des élu(e)s et non pas de l’unanimité. […] Je suis carrément pris entre le marteau et l’enclume », a mentionné au Courrier Frontenac le directeur général.

Il estime que son intervention publique à l’endroit des deux conseillères impliquées s’avérait être un ultime recours. « J’avais épuisé pas mal de tentatives de raccommoder le conseil, de me soustraire aux jugements des conseillères qui m’ont instrumentalisé dans une guerre politique. Je me sens comme si j’avais été pris au piège dans cette situation. »

M. Lebel a expliqué qu’au début, il s’agissait d’une guerre purement politique entre le maire, les membres du conseil faisant partie de la majorité et les élues Pinard et Jolin. « Très tôt, on a essayé de faire croire à la population que je n’avais pas tous les outils pour planifier les séances publiques. Dieu sait que ça en prend des compétences pour occuper le poste de directeur général. Si ce n’était pas le cas, ça fait longtemps que je ne serais plus là. Ça va faire deux ans que je suis en place et je n’ai jamais commis de fautes au niveau administratif. Malheureusement, on allègue toujours qu’il y a de mauvaises interprétations et que je calcule mal les comptes alors que les vérificateurs généraux certifient que tout est en bon état. »

Ce climat toxique affecterait selon lui d’autres employés municipaux. « Tout est fait en subtilité. Il s’agit d’insinuations. Certains me disent le ressentir continuellement. Ils se sentent attaqués sur le terrain. C’est très dur de travailler à Beaulac-Garthby! »

À son avis, la lutte politique qui sévit depuis la dernière élection municipale passe désormais par une remise en question des compétences des gens en place. « On recherche continuellement la faille. C’est incessant. C’est hallucinant. Je me lève le matin de la séance du conseil avec des maux d’estomac. Pourtant, j’ai 12 ans d’expérience derrière moi. […] Ce qui est surprenant, c’est que depuis ma fameuse plainte, le climat s’était drôlement amélioré. Les employés respirent mieux. Maintenant, qu’est-ce qui arrivera ? La CMQ vient de donner le champ libre aux hostilités. J’ai énormément de craintes sur ce qu’il peut se passer. »

Claude Lebel affirme avoir tenté d’alerter la CMQ sur certains points qui requéraient, selon lui, des ajustements de la part des conseillères Pinard et Jolin. « Mes remarques et mes plaintes ont toutes été rejetées dans l’heure qui suivait comme étant vexatoire et sans fondement. Je ne veux pas embarquer dans la théorie du complot, mais les employés de Beaulac-Garthby n’ont pas une entrée favorable à la CMQ. Certains d’entre eux ont aussi déposé des plaintes qui n’ont pas été retenues. »

Malgré tout, le directeur général a indiqué avoir l’intention de poursuivre son travail. « Je pense quitter mon emploi tous les jours, sauf que ce serait un désaveu envers la population et la partie du conseil qui m’appuie. Je crois que les citoyens, dans leur ensemble, apprécient le travail que je fais. Je n’ai jamais abandonné quoi que ce soit dans ma vie. Je n’ai pas l’intention de démissionner, mais je vous dirais que je trouve cela extrêmement dur et pénible. C’est l’une des expériences professionnelles les plus difficiles de ma vie. Toutefois, j’aimerais bien terminer ce que j’ai entrepris, au moins jusqu’à ma retraite. »