Garder l’entreprise « dans la famille » est maintenant avantageux
ÉCONOMIE. Le projet de loi C-208 a reçu la sanction royale le 29 juin. Modifiant la Loi de l’impôt sur le revenu du Canada, cette législation accorde le même traitement fiscal aux propriétaires vendant leur entreprise à un membre de leur famille ou à une personne sans lien de parenté.
Selon l’Union des producteurs agricoles (UPA), l’ancien cadre fiscal favorisait la vente d’une entreprise agricole à un étranger plutôt qu’à un membre de la famille. Pour l’Agence du revenu du Canada (ARC), un transfert intergénérationnel était un dividende et non un gain en capital.
« L’agriculteur était imposé s’il vendait à sa famille, mais ne payait pas d’impôt en vendant sa ferme à un étranger », dit James Allen, président de la Fédération de l’UPA de la Chaudière-Appalaches.
Plusieurs agriculteurs approchant de la retraite veulent garder leur ferme dans le giron familial. James Allen, propriétaire de la Ferme Jallen à Saint-Anselme, fait partie du lot.
« Je représente la sixième génération de notre ferme. L’un de mes fils a déjà des parts dans l’entreprise. On a commencé le processus de transfert, même si je ne suis pas encore prêt pour la retraite », précise-t-il.
Revirement libéral
En février 2020, le projet de loi C-208 a été déposé par le député conservateur Larry Maguire. À la Chambre des communes, il a reçu l’appui unanime des députés du Parti conservateur, du Nouveau Parti démocratique (NPD) et du Bloc québécois, mais pas celui du Parti libéral.
Après la sanction royale au Sénat, le gouvernement Trudeau voulait reporter l’entrée en vigueur de la loi C-208 au 1er janvier 2022. En situation minoritaire, le Parti libéral pouvait rendre la législation caduque en déclenchant une élection cet automne.
Pour James Allen, ce geste était illégal et démontre que le Parti libéral ne comprend pas les besoins des petits entrepreneurs. Richard Lehoux, député fédéral de Beauce, abonde dans le même sens.
« Cette loi touche les agriculteurs, mais également tous les types de PME. En situation minoritaire, c’est déjà rare qu’un projet de loi présenté par l’opposition soit approuvé à la Chambre des communes. C’est de l’obstruction politique purement libéral », affirme le député conservateur.
Vice-première ministre et ministre des Finances, Chrystia Freeland a confirmé le 19 juillet que les modifications ont maintenant force de loi. Le Parti libéral était préoccupé par des éléments techniques qui pourraient offrir, sans le vouloir, des possibilités d’évitement fiscal.
« Les modifications que nous avons l’intention de présenter respecteront la loi adoptée par le Parlement », mentionne celle-ci.
Richard Lehoux y voit encore la mauvaise foi du Parti libéral. « La majorité des libéraux s’opposaient à C-208. S’il y a des élections cet automne, il est fort probable que ces modifications ne sauront jamais discuter au Parlement », conclut M. Lehoux.